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Le Zen en Europe : Un état des lieux

Alioune Koné


Alioune Koné, doctorant à l'Ecole des Hautes Études en Sciences Sociales (Paris), propose dans cet article une analyse sociologique et médiologique de l'implantation du Zen en Europe. Cet article est la traduction française de Zen in Europe: A survey of the territory, rédigé en 2000. Traduction française de Georges Toullat, revue par Alioune Koné.

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Le Zen a été, avec le bouddhisme tibétain, l'une des traditions bouddhistes qui a le plus attiré les Occidentaux dans la seconde moitié du vingtième siècle. Au cours de ces quarante dernières années, des enseignants Chinois, Vietnamiens, Coréens et Japonais ont créé des organisations en Europe, et certains de leurs élèves ont commencé à enseigner. A la différence des groupes américains, qu'une littérature grandissante sur la construction d'un bouddhisme occidental cerne bien, ceux d'Europe sont moins bien connus [1]. Le but de cet article est de dégager les changements et les adaptations du bouddhisme Zen en Europe. Il propose un panorama des organisations zen européennes, et soutient qu'une approche institutionnelle permet d'éclairer des aspects essentiels de l'acculturation du bouddhisme Zen.

Cette approche recèle un inconvénient majeur, relevé dans un colloque qui se tint en 1993 à Stockholm. Un groupe de pratiquants expérimentés et d'enseignants s'étaient réunis pour savoir si l'apparition d'une pratique spécifiquement européenne du Zen, d'un "Zen Européen", était perceptible [2]. Les questions annoncées dans le programme étaient : "Quelles sont les qualités indispensables d'un Zen authentique, pluri-implanté en Europe dans des conditions européennes ? Que peut-on, et doit-on, demander aux transmetteurs d'un Zen authentique aujourd'hui ? Quelles sont les formes et les structures les mieux adaptées à la transmission du Zen en Europe ?" [3]

Selon l'un des participants, "Aucune de ces questions ne fut abordée. Il apparut rapidement qu'il n'y avait pas une identité unique Zen européenne. Des transmissions très variées du Zen étaient déjà en train de s'installer, si différentes dans leurs aspects personnels et culturels, qu'aucune dénomination commune n'était possible." [4]

La diversité des écoles historiques et des figures aujourd'hui connues en Europe sous le terme générique de "Zen" [5], reflétait d'importantes différences dans les croyances et les pratiques "importées". Les différences dans les situations légales, culturelles et sociales en Europe, sans oublier les spécificités de lignée ou des caractéristiques personnelles, défient toute tentative de généralisation. Peut-on rendre compte sociologiquement de la grande variété des approches actuelles du bouddhisme Zen ?


Champ de l'étude et approche

Le grand orientaliste H. Dumoulin fournit un bon point de départ : "Le Zen a été introduit en Occident, au début du siècle, longtemps après les mutations et les transformations de son histoire pluriséculaire en Asie. La transposition d'Orient en Occident, malgré des efforts pour préserver une continuité, a inévitablement nécessité de nouvelles versions du Zen." [6]. Cette remarque fait étrangement écho à l'affirmation de R. Debray selon laquelle "transmettre, c'est réinventer, donc altérer. Pourquoi ? Parce que l'information transmise n'est pas indépendante de son double médium, technique et organique." [7]. Ce parallèle suggère que certaines des hypothèses de R. Debray pourraient être fructueusement appliquées au bouddhisme Zen d'Occident. [8]

On sait que pour R. Debray la médiologie est un champ d'étude - et non une nouvelle discipline - consacré à l'étude des processus de transmission symbolique et de leurs agents, dans le temps et dans l'espace. Parce qu'un "message qui ne trouve pas son cristal institutionnel partira en fumée" [9], la médiologie étudie les contraintes qu'exercent les médiums sur les messages ainsi que les affinités entre les médiums et les messages. De la même façon, cet article avance l'hypothèse que pour comprendre la diffusion en Occident du bouddhisme Zen, s'intéresser aux groupes qui constituent aujourd'hui le paysage des organisations bouddhistes européennes fournit une partie des logiques de transplantations d'un groupe de culture à un autre des pratiques du bouddhisme Zen. Pour autant, la méthode et les approches utilisées ici se situent dans l'approche descriptive des sciences sociales du religieux plutôt que dans le champ médiologique. Nous chercherons à rendre compte de la diversité des approches des groupes et centres que fréquentent les Européens engagés dans la pratique du Zen aujourd'hui.

Pour donner une image des organisations actives en Europe de l'Ouest, un tableau composé de 452 groupes zen répartis sur quatorze pays a été élaboré [10]. Chaque groupe recensé constitue une entrée. Des groupes différents affiliés à une même organisation ont été considérés comme autant d'entrées, afin de rendre compte de l'implantation de chaque organisation. Cette approche comporte trois problèmes méthodologiques majeurs.

Tout d'abord, les centres zen apparaissent et disparaissent plus vite que la réédition des annuaires. Les données présentées ici datent de 2000 et ne sont déjà plus à jour. Ensuite, certains centres sont réticents à une trop grande publicité, préférant ne pas s'affilier aux associations de type fédération bouddhiste nationale, pour des raisons qui vont des divergences philosophiques, au désir de rester indépendant ou de taille limitée. Ils peuvent donc ne pas être représentés dans les annuaires.

La réserve la plus forte concernant l'approche par centres a été soulevée récemment par Thomas Tweed. Celui-ci remarque que les universitaires comme les pratiquants ont tendance à poser des définitions normatives sur ce qui devrait relever du bouddhisme. Comme les "bouddhistes de l'ombre" et les sympathisants font sans nul doute partie du paysage du bouddhisme en Occident [11], il propose de prendre en compte les définitions personnelles plutôt que le critère de participation aux activités bouddhistes. Il est vrai que privilégier les listes de centres plutôt que les individus ne permet pas de rendre compte de l'image populaire du Zen, telle qu'on peut la trouver dans certains best-sellers comme Le Zen et l'art d'entretenir les motocyclettes de Pirsig, ou Le Zen et l'art de changer les couches cité par Tweed. Ces réserves structurent la portée et les points abordés de cette analyse. Ses principes directeurs sont les suivants :

(1) Cette étude ne prétend pas rendre compte des sympathisants ou des individus qui ne sont pas affiliés à un centre. De même, bien que l'immigration chinoise, vietnamienne ou coréenne ait conduit à l'établissement de communautés d'une certaine ampleur en Angleterre, en France et en Allemagne, les organisations qui s'adressent à ces communautés ne seront pas examinées ici [12]. Cependant, l'attention portée aux centres de convertis - terme par lequel nous entendons simplement des individus venus à une tradition dans laquelle ils ne sont pas nés - au bouddhisme, ne signifie pas qu'ils résument à eux seuls l'inculturation du bouddhisme Zen en Europe. On peut distinguer dans un panorama du bouddhisme des Occidentaux, un cercle de pratiquants, réunis autour d'une ou plusieurs autorités spirituelles, un cercle de sympathisants ou pratiquants épisodiques, et un cercle plus large où des idées ou termes empruntés au bouddhisme sont repris, réinterprétés et popularisés. C'est dans ce dernier cercle que le "Zen" est devenu un terme si souvent utilisé, en référence à tout (depuis l'entretien des motocyclettes à l'art de changer les couches) et qu'il est ainsi devenu un adjectif courant en français. Nous restreindrons notre étude au premier cercle.

(2) La diversité des écoles et le caractère "bourgeonnant" du phénomène limite sérieusement la validité d'une telle compilation. Les informations ont été reprises à partir de listes publiées par les unions bouddhistes nationales, des annuaires et d'Internet [13]. La liste ainsi construite ne prétend pas représenter toutes les activités relatives au Zen dans les pays considérés, pas plus qu'elle n'a opéré de sélection selon des critères d'importance, de primauté ou d'authenticité. Elle cherche simplement à donner une perspective "à vol d'oiseau" du paysage. De plus amples recherches et un affinement de la liste compilée seraient nécessaires pour des conclusions statistiques significatives qui ne relèvent pas de cet article. Nous n'avons pas appliqué d'autres critères à l'inclusion dans la liste que l'identification des groupes eux-mêmes comme reliés au Zen.

(3) Les questions et les débats présentés dans la seconde partie reposent sur des matériaux collectés entre 1993 et 1999 dans une enquête ethnographique par observation participante, ainsi que par des entretiens formels et informels au sein de groupes qui se réclament plus ou moins du maître zen Sôtô japonais Taisen Deshimaru (1914-1982) [14]. Des entretiens et des correspondances avec des pratiquants d'autres écoles laissent à penser que les questions et les schémas d'adaptation observés se retrouvent dans d'autres groupes. Néanmoins, mon analyse reste une étude de cas et ne prétend pas représenter l'ensemble du paysage esquissé dans la première partie.


1. Un aperçu des organisations Zen en Europe

Avant les années 1920, le bouddhisme Zen était inconnu en dehors des cercles académiques. Quelque quarante ans plus tard, des Européens commençaient à pratiquer au sein de cette école. Cette partie est consacrée à décrire quelques-unes des forces à l'oeuvre dans cette mutation.

1.1. Les premiers développements (1787-1930)

Des conversions au bouddhisme Zen eurent lieu avant le vingtième siècle. Le cas de Christovao Ferreira (1580-1650) est saisissant. Ce missionnaire portugais au Japon renia sa foi au cours des persécutions chrétiennes, devint moine zen et publia un pamphlet contre le Christianisme en 1636 [15]. De plus amples informations sur le bouddhisme Zen japonais parvinrent en Europe aux dix-septième et dix-huitième siècles. Des lettres de François-Xavier, écrites avant qu'il ne quitte le Japon, montrent une certaine connaissance des pratiques bouddhistes. Plus tard, L'Histoire du Japon de Kaempfer (publiée en 1727) donnait une description précise de la méditation assise zen (zazen). Il n'y eut cependant pas de conception d'un bouddhisme cohérent avant la seconde moitié du dix-neuvième siècle, pas plus que d'une école zen distincte [16]. Les premiers Européens à embrasser le bouddhisme furent attirés par le Theravada qui était alors souvent présenté comme le bouddhisme le plus pur [17]. Aucune des organisations fondées dans les années 1920 pour promouvoir le bouddhisme en Europe ne s'enracinait dans le Zen. Les figures importantes dans cette première période de réception/réinvention du Zen en Europe étaient des écrivains et des intellectuels. Cette première période était celle d'un intérêt littéraire.

Dans les années 1930, l'itinéraire de Christmas Humphreys (1901-1983) incarne l'essor d'une nouvelle perception des écoles zen en-dehors des cercles académiques. Cet Anglais, issu d'une grande famille de juristes, adopta le bouddhisme dès 1918, soutenant dans une approche théosophique l'unité des enseignements bouddhistes et des grandes traditions religieuses [18]. Mais il devint de plus en plus fasciné par les enseignements zen, écrivant ainsi en 1951 : "Le Zen est l'apothéose du bouddhisme" [19]. Pour Humphreys, comme pour beaucoup d'Européens pendant la première moitié du vingtième siècle, le passage de l'intérêt pour le bouddhisme Theravada au Zen fut fortement influencé par les écrits et le charisme de Daisetz Teitaro Suzuki (1870-1966). D. T. Suzuki était un érudit et un disciple laïque du maître zen Rinzai Sôen Shaku (1859-1919). Il ne fut pas simplement, comme il se présentait modestement lui-même, "le premier à proposer une étude particulière du Zen en anglais" [20]. Son intérêt pour la philosophie et la psychologie occidentales lui permirent de présenter le Zen à un public plus large, en fait, d'être le "passeur" de cette tradition.

Au fait de la pensée et de la philosophie occidentales, D. T. Suzuki donne une définition du Zen qui le rend à la fois proche et fascinant pour son audience occidentale. Les universitaires allemands se trouvaient à l'avant-garde de l'intérêt pour les pratiques zen, tout comme ils l'avaient été dans le processus de traduction de textes bouddhistes. Rudolf Otto (1869-1937) préfaça la première traduction de textes zen en allemand où il signalait les transformations existentielles dues à la pratique de la méditation zen [21]. Le professeur de philosophie Eugen Herrigel (1884-1955) fut une autre figure influente de ces premiers développements. Son approche du Zen par le tir à l'arc est encore l'un des ouvrages les plus cités dans les milieux zen européens [22].

Le Zen en vint à être considéré dans les milieux occidentaux comme l'une des formes les plus pures du bouddhisme, une conception à résonance nationaliste dans le Japon d'avant-guerre [23]. "L'expérience Zen" décrite par Suzuki et ses épigones - compatible avec la raison bien que plus élevée, universelle quoi que l'essence même de la culture japonaise - était une philosophie qui suscitait un intérêt à la fois "romantique" et "rationaliste" pour le bouddhisme [24].

Bien que Suzuki élargit l'audience du Zen, le caractère technique de ses ouvrages rendait sa présentation d'un accès difficile. Alan Watts (1915-1973), que l'on surnomma "le Norman Vincent Peale du Zen" [25], fraya le chemin pour l'enseignement du Zen à un public plus large. Nombre de jeunes Européens et Américains s'intéressèrent à la pratique du Zen grâce à lui [26].

D'autres écrivains moins connus ont également joué un rôle dans la popularisation du Zen dans différents milieux. Leurs récits expriment les conceptions du Zen selon différentes perspectives. Ils se réfèrent souvent à l'approche de D. T. Suzuki. Le docteur Hubert Benoît (1904-1992), traducteur des oeuvres de Suzuki en français, donna son propre exposé du Zen, qui reflétait son intérêt pour la psychologie et l'influence de George Gurdjieff (1912-1949). Robert Raam Linssen fonda en 1935 le Centre Pour les Nouvelles Religions et Philosophies à Bruxelles. Ses ouvrages fournissaient un exposé populaire du Zen et du taoïsme qui reflètait une longue proximité de Krishnamurti.

L'Irlandais Terence Gray (1895-1986), un aristocrate qui fit ses études à Oxford, écrivit entre 1958 et 1974 une présentation des conceptions du Chan qu'il signait du pseudonyme de Wei Wu Wei. Ses livres et articles, où il mêle des références Chan aux conceptions taoïstes et aux enseignements de figures religieuses telles que Padmasambhava et Sri Ramana Maharshi, révèlent une approche autorisée et quelque peu éclectique des idées du Zen.

La traduction des thèmes du Zen sous des formes philosophiques, psychologiques ou ésotériques le rendit de plus en plus populaire. Dans les années 1960, cela tenait du snobisme intellectuel [27]. L'arrivée de fondateurs ouvrit une ère nouvelle dans l'intérêt des Européens pour le bouddhisme Zen. Mais ils n'arrivaient pas en terrain vierge, ils durent réfuter une image faite d'un conglomérat de traits exotiques, ésotériques et fortement intellectuels qui avaient fini par être identifiés au Zen par le public cultivé.

1.2. Les fondateurs

La fin des années 1960 et les années 1970 furent l'époque du "boum zen" en Europe. L'intérêt nouveau pour les pratiques méditatives contribua à la création de centres et de groupes. Durant les trois décennies suivantes, des centres zen fleurirent dans toute l'Europe occidentale, d'abord en Allemagne, en Angleterre et en France. Ce dynamisme ne résultait pas seulement d'un grand intérêt né de la lecture des publications de la période précédente comme facteur d'attraction (une demande forte). Il résultait également de l'installation sur le vieux continent d'enseignants qualifiés (une nouvelle offre disponible).

On peut distinguer quatre catégories de fondateurs : Des enseignants asiatiques animant des communautés de convertis, des Européens autorisés à enseigner par des maîtres asiatiques, des enseignants formés par des maîtres occidentaux, et des enseignants non-bouddhistes.

Les premiers fondateurs de centres européens après la seconde guerre mondiale étaient des missionnaires asiatiques. Entre autres, Nagaya Kiichi (1895-1993) de l'école japonaise Rinzai, et Taisen Deshimaru (1914-1982) formé dans l'école Sôtô Japonaise. En 1965, Nagaya Kiichi, professeur émérite à l'Université Impériale de Tokyo, et enseignant bouddhiste laïque, revint à Berlin, où il avait étudié en 1922, pour introduire le Zen en Allemagne. Moins de deux ans après, ayant trouvé un groupe de personnes intéressées par la pratique du Zen, il dirigeait en Allemagne plus d'une douzaine de sesshins (des périodes de pratique intensive) par an [28]. Taisen Deshimaru arriva, lui, à Paris en 1967, afin "d'apporter le Zen en Occident". Trois ans plus tard, il créait l'Association Zen d'Europe qui organisa des sesshins et ouvrit des centres dans la plupart des pays Européens en une dizaine d'années [29].

Thich Nhat Hanh est l'enseignant bouddhiste vietnamien le plus marquant qui se soit installé en Europe et qui ait attiré des élèves européens. Contraint à l'exil peu après avoir créé l'Ordre de L'Inter-Etre (Tiep Hien, une communauté de bouddhistes socialement engagés), il s'installa en France en 1966. Une communauté de Vietnamiens et de convertis se rassembla autour de lui dans les années 1970. Celle-ci dut se déplacer de lieu dans les années 1980 avec l'augmentation du nombre de pratiquants et de résidents.

La plupart des groupes zen qui revendiquent un rattachement à la tradition coréenne Son se réfèrent à Seung Sahn et à son école Kwan Um Zen [30]. Cette organisation propose des activités en Europe depuis les années 1970, tout d'abord en Pologne et en Allemagne. Sa croissance a été décrite en ces termes : "Seung Sahn parcourt le monde, donne des conférences publiques dans un grand nombre de villes et encourage les sympathisants locaux qui viennent l'écouter à ouvrir un centre zen" [31]. D'autres maîtres asiatiques sont venus plus tard en Europe. Des enseignants tels que Ryôtan Igarashi furent officiellement nommés en tant que missionnaires en Europe par les autorités du Zen Sôtô japonais à la fin des années 1990 [32].

Les Européens qui ont pratiqué en Asie ou qui ont reçu de maîtres asiatiques l'autorisation d'enseigner constituent un autre groupe de fondateurs. La plupart d'entre eux ont créé leurs groupes dans les années après 1970. Dans la tradition du Zen Sôtô japonais, la Britannique Peggy Jiyu Kenneth est un exemple frappant. Tout d'abord intéressée par le bouddhisme Theravada, elle se tourna vers le Zen et fut ordonnée en 1962 dans la tradition Chan, avant de se rendre dans un monastère japonais. Après avoir reçu la reconnaissance officielle de son maître dès 1963 (tôt en comparaison avec la plupart des enseignants européens), elle fonda des centres en Amérique et en Angleterre. Etrangement, elle eut des visions à connotation chrétienne en 1977, et elle employa un langage inspiré par la tradition chrétienne dans son organisation, l'Ordre des Bouddhistes Contemplatifs [33].

Plus d'une douzaine d'Européens furent reconnus en tant que maîtres zen Sôtô dans les années 1980-1990. L'Allemand Ludger Tenryû Tenbreul, l'Italien Fausto Taiten Guareschi, la Française Luce Joshin Bachoux et l'Espagnol Francisco Dokusho Villalba sont quelques-uns de ces fondateurs locaux. Certains enseignants américains ont étendu leurs activités en Europe. Ainsi, Philip Kapleau, le fondateur du Centre de Rochester et le fameux auteur des Trois piliers du Zen, dirigeait des retraites dans des centres suédois et allemands. Richard Baker, héritier du dharma de Shunryû Suzuki (1904-1971) et ancien abbé du Centre Zen de San Francisco, est un autre exemple. Il a développé le Dharma Sangha, une organisation américaine, avec des centres en Allemagne et Autriche. De la même façon, le Zen Institute of America, dont le siège se trouve à Los Angeles, fondé par la Vénérable Gesshin Myoko Prabhadasadharma possède des centres affiliés en Allemagne, aux Pays-Bas et en Espagne.

Un nombre moins important d'enseignants européens ont été formés dans l'école Rinzai. Georges Jyoji Frey, Luigi Taino Mario et Hans-Rudolf Genpo Dörin ont respectivement fondé des centres Rinzai en France, en Italie et en Allemagne. Herbert Genro Koudela dirige un groupe à Vienne, en Autriche, dans le style de pratique qu'il apprit auprès de Joshu Sasaki, un maître zen vivant en Californie.

Chez les Européens, la pratique du Chan chinois se rattache souvent à deux enseignants : John Crook et Ton Lathouwers. Le premier a été autorisé à enseigner par le Maître Sheng-Yen. L'Association du Chan Occidental (Western Chan Fellowship) de Crook propose des périodes de pratique tout au long de l'année à Avon (Royaume-Uni). Ton Lathouwers est un ancien professeur de philosophie qui a pratiqué au Japon et en Indonésie. Reconnu formellement par Te Ching (connu également sous le nom de Jinarakkhita), il dirige depuis 1987 le Mahâ Karuna Ch'an, un réseau délibérément informel de groupes en Belgique et aux Pays-Bas. [34]

L'école Kwan Um Zen se trouve potentiellement à une nouvelle étape de son développement depuis le milieu des années 1990 avec la reconnaissance de Jacob Wu Bong Perl, d'origine polonaise, comme maître zen par Seung Sahn. Etabli à Paris depuis 1995, tout en voyageant pour enseigner en Allemagne, en Espagne, en Belgique et en Suisse, Jacob Perl a largement contribué à la diffusion de l'école Kwan Um Zen auprès des Européens [35].

D'autres Européens ont pratiqué sous la direction de maîtres Américains et ont, par la suite, fondé des centres à partir des années 1980. L'un des successeurs de Taizan Maezumi rôshi (1931-1995), Dennis Genpo Merzel, a autorisé des élèves européens comme le Hollandais Anton Tenkei Coppens et la Française Catherine Genno Pagès à enseigner. Cette dernière anime actuellement des sesshins en Angleterre, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Pologne et en Belgique [36].

Le quatrième groupe de fondateurs utilise des enseignements et des pratiques zen dans un contexte non-bouddhiste. Hugo Makibi Enomiya-Lasalle (1898-1990) et Karlfried Graf Dürkheim (1896-1988) sont les plus connus. Enomiya-Lasalle était un missionnaire allemand en poste au Japon pendant la guerre. A partir de 1940, il est prêtre à Hiroshima. Blessé par le souffle de la bombe atomique en 1945, il y édifia l'Eglise de la Paix Mondiale au début des années 1950. A partir de 1956, il devint un étudiant de Sogaku Harada (1871-1961) puis il poursuivit son entraînement avec ses successeurs. De 1968 jusqu'à sa mort, il dirigea des sesshins en Allemagne et envoya plusieurs de ses élèves au Japon pour recevoir l'autorisation d'enseigner. Dans les centres qu'il a inspiré, la méditation assise (zazen) est pratiquée dans un contexte chrétien [37].

K. G. Dürkheim, un aristocrate allemand envoyé au Japon comme attaché culturel en 1939 est un autre fondateur important d'une pratique zen non-bouddhiste en Europe. Après son retour en Allemagne à la fin des années 1940, il créait le "Centre de rencontre et de formation en psychologie existentielle" à Rütte, dans la Forêt Noire qui devint, dix ans après, un village entier. Pour Dürkheim, la pratique du Zen s'intègre dans la thérapie initiatique, une méthode de reliaison de l'individu avec le soi et le monde par une expérience transcendante [38]. La conception psychologique du bouddhisme Zen, subordonnée à l'approche religieuse dans les ouvrages de D.T. Suzuki, s'était frayée son propre chemin. Le Zen pour chrétiens et le Zen thérapeutique, c'est-à-dire la pratique de la méditation zen dans une présentation chrétienne ou thérapeutique, sont devenus une composante non négligeable du Zen en Europe.

1.3. Situation actuelle et limites de l'approche par tableau

Le tableau ci-dessous donne une vue d'ensemble de la répartition du Zen en Europe Occidentale (tableau 1). Malgré ses limitations - principalement l'impossibilité de valider des hypothèses sur les activités et les audiences réelles des groupes considérés - il cartographie un ensemble de pays dans lesquels des groupes zen sont bien repérables avec des centres établis depuis plus de vingt ans.

L'Allemagne est le premier pays avec le plus de centres répertoriés. La France, les Pays-Bas, la Belgique, le Royaume-Uni et la Suisse (avec chacun plus de trente centres) forment avec l'Italie un second groupe. L'Autriche, la Pologne et l'Espagne possèdent de quinze à vingt centres connus. Peu de groupes sont répertoriés au Portugal et dans les pays scandinaves (La Suède ferme la marche avec huit groupes recensés. Rapporté au nombre d'habitants, cela représente une forte implantation). Les pays ayant plus de trente centres sont ceux où les groupes zen sont fortement visibles et affiliés à des organisations nationales. Ces organisations représentent les positions bouddhistes à des niveaux nationaux ou internationaux. Elles facilitent la diffusion d'informations sur les activités, les retraites et la localisation des centres bouddhistes.


Tableau 1: Répartition des centres Zen en Europe

Nombre de centres recensés Plus de 60 De 30 à 60 De 15 à 30 Moins de 10
Pays Allemagne France, Pays-Bas, Belgique, Royaume-Uni, Suisse, Italie Autriche, Pologne, Espagne Suède, Danemark, Portugal, Norvège


Cette approche ne permet pas non plus d'inférer l'importance de chaque organisation. Les affiliations ont une signification variable, allant de liens informels et/ou rencontres occasionnelles, jusqu'à la direction stricte par un centre principal ou un temple. Néanmoins, deux réseaux émergent : L'Ordre de L'Inter-Etre (environ 6 % du total) et les groupes se rattachant à T. Deshimaru, définis de façon large comme les groupes appartenant à l'association qu'il avait fondée (Association Zen Internationale ou AZI) et les groupes dirigés par d'anciens élèves ayant pratiqué avec d'autres enseignants, mais ayant eu leur premier contact avec le Zen au sein de cette organisation (environ 11 %). Un troisième ensemble, qui ne constitue pas un seul réseau, représente malgré tout 10 % du total : Il s'agit des groupes pratiquant le Zen dans un contexte chrétien. Ce "Zen chrétien" est surtout présent en Allemagne, en Autriche et dans les pays scandinaves.

Le recensement des entrées montre également que les barrières des écoles sont de plus en plus floues. En Allemagne, en Autriche et en Suisse, un nombre croissant de centres ne se réclament d'aucune école particulière, restant, au contraire, ouverts à de nombreux enseignants. L'Institut Tiltenberg aux Pays-Bas en est un bon exemple. Consacré initialement à un mouvement de femmes chrétiennes, ce centre près d'Amsterdam devint dans les années 1970 un lieu où différents enseignants et universitaires étaient invités à diriger des périodes de pratique ou à donner des conférences. Un de ses fondateurs expliquait : "Parce que le Zen s'enracine dans des contextes religieux et culturels si différents, nous sommes convaincus que nous avons besoin de toute l'aide possible pour trouver la bonne méthode de transmission d'un Zen authentique de l'Extrême-Orient en Europe et plus généralement en Occident." [39]

Nombre d'écoles présentes en Europe trouvent leur origine dans de multiples traditions [40], contribuant à rendre moins pertinentes les distinctions d'écoles. Certains centres sont pan-bouddhistes et invitent des enseignants de diverses écoles bouddhistes. D'autres invitent régulièrement des enseignants non-bouddhistes. Dans l'ensemble, comme on pouvait s'y attendre, le tableau décrit la diversité sans l'expliquer.


2. Des questions à l'oeuvre dans un réseau de groupes Zen européens

Cette section examinera les groupes apparentés à Taisen Deshimaru rôshi (1914-1982). La majorité d'entre eux sont affiliés à l'AZI, dont le siège est au temple de la Gendronnière, en France. Environ 20 % des groupes considérés sont indépendants mais sont dirigés par des enseignants qui ont commencé à pratiquer avec T. Deshimaru, sans perpétuer aujourd'hui son enseignement, ou sans être aujourd'hui affiliés à cette organisation. Ces groupes peuvent cependant être considérés comme une part de l'héritage du fondateur qui a initié au Zen leurs dirigeants actuels. Les problématiques qui différencient ces groupes sont proposées comme des outils pour comprendre sociologiquement les dynamiques de diffusion du Zen dans une nouvelle culture et dans un nouveau contexte social. Je soulignerai trois problématiques qui façonnent cette transmission : La viabilité, la légitimité et l'autorité. [41]

2.1. La question de la viabilité

La comparaison des institutions zen met au premier plan une question : Comment ces organisations survivent-elles à court et à long terme ? Comment génèrent-elles assez de revenus pour rester viables ?

D. Williams et S. Asai ont comparé les bilans financiers d'un centre de convertis et d'un temple d'américano-japonais [42]. Ils ont relevé que ce dernier tirait principalement ses revenus d'événements culturels et de dons, alors que le premier les tirait de la méditation et de la vente d'objets liés à la quête spirituelle (nombre de ces centres vendent des coussins de méditation, de l'encens, et des ouvrages de spiritualité [43]). La plupart des centres étudiés ici suivent le modèle des centres de convertis aux États-Unis. Cependant, l'étude des groupes animés par des anciens élèves de Deshimaru suggère qu'il convient de distinguer les centres non-résidentiels d'une part et les congrégations de l'autre parmi les centres de convertis.

Les centres non-résidentiels ont souvent des prix affichés avec des réductions pour étudiants ou chômeurs pour participer à leurs activités. Ils fonctionnent comme des associations à but non-lucratif, les participations des membres permettant de couvrir les dépenses, essentiellement des remboursements de prêts ou des loyers. Souvent au départ des centres urbains, ces centres achètent ou louent des lieux à la campagne, pour y proposer des retraites à mesure qu'ils grandissent. Les membres participent à ces périodes de pratique intensives qui vont de quelques jours à deux mois. Si la croissance du groupe continue, les charges administratives augmentent, conduisant soit à la division, soit à vouloir attirer une audience plus large, offrir des activités nouvelles ou à augmenter les prix [44]. Ces groupes ont souvent un taux de rotation important, avec un noyau d'anciens pratiquants.

D'autres groupes présentent un modèle économique différent. Enregistrés comme congrégations religieuses, ils proposent principalement une pratique résidentielle. Ces centres n'ont parfois pas de prix fixes pour leurs activités. Les dons forment leur principale source de revenus. Les dépenses sont limitées : soit le prix du lieu a été réglé une fois pour toutes - Comme en Asie où de riches donateurs offrent parfois des terrains pour y construire des temples ou des centres - soit le nombre de résidents permanents est limité. Le modèle résidentiel demande souvent une plus forte implication que dans les groupes de membres laïques. Ces élites religieuses seront des guides pour une communauté laïque plus large, qui en retour soutiendront les moines. Ces centres croissent lentement, faisant peu ou pas de publicité, un accroissement brutal des adhérents pouvant mettre en péril ces organisations. Deux choses déterminent donc la viabilité de ce modèle : le nombre de personnes résolues à observer des vœux monastiques et l'aide offerte par les laïcs.

2.2. La question de la légitimité

Les groupes diffèrent également par le type de légitimité qu'ils favorisent. Transmettre des enseignements dans un contexte nouveau implique une définition de la légitimité comme fondation de l'autorité et de l'enseignement nouvellement introduit. Pour toute organisation, la reconnaissance sociale et un environnement social aussi favorable que possible s'avèrent aussi importants que l'équilibre financier à long terme. Les institutions proposant des pratiques bouddhistes zen doivent se définir par rapport à une tradition. Plus précisément, elles doivent décider s'il leur est nécessaire de demander un engagement religieux à leurs adhérents. Par engagement religieux, j'entends ici l'inscription dans une lignée de croyants, telle que l'a proposée Danièle Hervieu-Léger [45].

On peut soutenir que les écoles zen et tibétaine attirent les Occidentaux par l'accent qu'elles mettent sur la relation maître-disciple qui occulte, dans les premiers temps de l'engagement, les aspects explicitement religieux. Néanmoins, pour s'adapter et rester dans un groupe, les individus doivent définir pour eux-mêmes la manière dont ils s'inscrivent dans une lignée de croyants. Cette question est distincte de celle du rattachement à une école donnée ; en d'autres termes, la conversion, entendue cette fois comme l'inscription dans une perspective religieuse est un processus que tous les pratiquants des centres étudiés ne mènent pas et ne souhaitent pas mener. Les institutions, en revanche, sont obligatoirement conduites à se définir par rapport à une tradition qui fournirait la légitimité et la nature de leurs activités.

Parmi les anciens élèves de Taisen Deshimaru, on peut rencontrer une grande variété d'attitudes envers la tradition japonaise du Zen Sôtô [46].

>> La reproduction de la tradition

Un petit nombre d'anciens disciples de T. Deshimaru ont fondé des centres qui reproduisent le plus fidèlement possible le style de pratique japonais. Un pratiquant de l'un de ces temples prévoyait de se rendre dans un monastère au Japon. Il expliquait son choix de recourir à ce centre comme une préparation à la pratique dans un monastère japonais : "Il me paraît prétentieux de décider quelle part de la tradition est essentielle, laquelle est accessoire. On croit être capable de faire la différence, et c'est rarement le cas." [47]. Ce premier groupe de pratiquants et de centres choisit donc de répéter les structures et rituels propres aux organisations asiatiques du Zen. Les dirigeants de ces groupes cherchent à créer une structure monastique avec une hiérarchie de "virtuoses" dont l'ensemble de la vie quotidienne cherche à respecter les prescriptions de l'ordre Sôtô japonais. Certains de ces individus servent une communauté plus large de laïcs qui participent épisodiquement au genre de vie des moines et moniales. Sous l'effet de la nécessité, les mêmes temples traditionnels accueillent cependant souvent hommes et femmes, ce qui illustre que la reproduction de ces structures issues de plusieurs siècles d'histoire ne peut être que graduelle, c'est un objectif, un processus sans cesse continué, plutôt qu'une réalité.

>> L'adaptation de la tradition

Dans ce second cas, des innovations volontaires sont introduites si elles sont perçues comme cohérentes avec la tradition. La plupart des anciens élèves de Deshimaru se rangent dans ce groupe, car il avait lui-même encouragé ses élèves à "créer, innover à partir de la sagesse du zazen, plutôt que de ressasser une langue morte" [48]. Nos observations montrent que ce processus est lent. Les innovations demandent à être collectivement examinées et approuvées. L'idée d'une nécessaire adaptation du Zen aux conditions occidentales est un thème récurrent chez les convertis. Pour les fondateurs asiatiques, cet objectif fut souvent lié à la perspective d'une réforme du Zen dans leur propre pays d'origine. Les enseignants européens ont tendance à insister sur le fait que leur mission consiste à adapter un entraînement asiatique qu'ils ont du supporter. Cependant, la plupart des groupes insistent sur l'existence d'une continuité directe avec leurs prédécesseurs.

>> La distanciation de la tradition

En 1999, un ancien disciple de Taisen Deshimaru a créé un groupe dénommé "Un Zen Occidental". Dans un séminaire tenu en Belgique sur le thème de la possibilité d'un Zen Occidental, il résumait ainsi son regard distancié sur la tradition Zen : "Je n'arrive pas à réduire le Zen à une expérience - celle de la méditation - qui en constituerait l'essence. L'adaptation du Zen est souvent considérée comme la transposition d'un noyau dur qui en constituerait son armature, et le rejet de "concrétions culturelles". L'occidentalisation du Zen doit procéder différemment : Par la compréhension de ses cadres de pensée orientaux ainsi que par celle de nos propres cadres (la modernité)." Potentiellement, les changements et les adaptations peuvent dans ce cas être plus radicaux, car certains éléments sont susceptibles d'être écartés pour cause d'incompatibilité. Le terme de distanciation, comme prise de distance réflexive, marque cette attitude par rapport à la tradition, située d'emblée dans un ailleurs qu'il ne s'agit pas de réduire mais de comprendre.

>> L'emprunt à la tradition

On intègre ici des éléments empruntés à la tradition pour des raisons variées - psychologiques, philosophiques ou religieuses (dans une optique essentiellement chrétienne, bien que d'autres intégrations soient possibles). L'individu réinterprète consciemment la tradition dans une autre tradition intellectuelle ou religieuse. Une ancienne disciple de Deshimaru, qui a reçu la transmission d'un autre maître au Japon après la mort de Deshimaru, dit : "Il s'est passé depuis lors quelque chose de fondamental dans mon cheminement spirituel : La redécouverte de mes racines chrétiennes... Ma manière d'être bouddhiste maintenant, c'est de renoncer à être bouddhiste." [49]. Dans cette dernière option, les références et pratiques du bouddhisme pourront être intégrés à des perspectives issues de la psychanalyse ou du christianisme. Le Zen est alors l'un des composants d'une approche plus ou moins syncrétique.

Dans le processus d'adaptation culturelle, les groupes zen peuvent se considérer comme significativement différents de leurs homologues asiatiques. Des groupes non-bouddhistes comme les mouvements psychologisants ou du Nouvel Age qui utilisent des principes ou des pratiques du Zen hors d'un contexte bouddhiste sont des cas extrêmes de ce processus singulier d'adaptation. [50]

Dès lors, la référence à une tradition ne suffit pas à différencier les groupes. Comme le remarque A. Giddens, la tradition est souvent de nos jours une "parodie de tradition, [qui] ne tire son identité que de la réflexivité du moderne" [51]. D. Hervieu-Léger a suggéré que, dans le contexte moderne, la religiosité peut se différencier selon le processus de légitimation. Elle note que les individus peuvent valider leurs croyances soit par eux-mêmes, soit mutuellement, soit par l'intermédiaire d'une institution ou d'une communauté [52]. Les deux premières catégorisations sont hors du champ de notre article, mais les deux dernières sont utiles, car on peut les retrouver dans les différentes attitudes face à la tradition présentées plus haut.

Un premier groupe de centres souligne la direction d'un enseignant particulier ou d'un groupe d'autorités spirituelles. Les croyances y sont mutuellement validées et s'appuient sur le charisme de l'enseignant. La transmission est alors considérée comme la confirmation d'une autorité charismatique. Le dirigeant choisit la personne sans, ou peu, d'interférences extérieures. Les capacités de cette personne sont souvent reconnues bien avant cette reconnaissance officielle. Les croyances du groupe sont validées par la vie et la pratique communautaires, que ce soit dans un contexte monastique ou bien dans des communautés urbaines laïques. L'autorité sera plus ou moins approuvée et consentie par le groupe seul.

Dans la seconde catégorie de groupes, une reconnaissance extérieure est plus importante. La transmission est considérée comme la répétition de doctrines et de rituels confirmés par des institutions historiques. Recevoir la transmission signifie alors être inscrit dans une lignée ininterrompue de croyants. Les dirigeants sont réputés avoir satisfait aux exigences formelles requises par des organisations extérieures au groupe. Dans ce cas, des liens et une reconnaissance par des membres autorisés d'une organisation principale sont primordiaux. Dans le groupe, l'enseignant ne fait autorité que dans la mesure où il (ou elle) se conforme à un ensemble de conduites qui fonde sa légitimité. La transmission est alors considérée comme l'attestation nécessaire de la capacité d'enseigner, en l'incarnant, le Zen. [53]

2.3. La question de l'autorité

Comment devient-on un dirigeant ? Quelle autorité se voit reconnue dans les groupes zen ? Comment régler les relations hommes-femmes dans le contexte d'une culture égalitaire ? Ces questions ont largement été débattues dans les cercles zen occidentaux, à la suite de scandales qui impliquaient des enseignants zen dans plusieurs centres américains au cours des années 1980. Dans la décennie suivante, des enseignants européens se sont vus remettre en question sur des considérations éthiques [54].

Un ancien membre de l'AZI a rédigé un rapport critique sur cette organisation [55]. Il y dénonçait la structure hiérarchique du groupe et critiquait le comportement de certains membres les plus anciens, pour conclure qu'il ne pouvait recommander ce groupe à quiconque s'intéressait à la pratique du Zen. Une étude sociologique détaillée de ce document n'a pas sa place ici. Il doit néanmoins être cité afin d'illustrer les conceptions de l'autorité largement acceptées par les membres et les anciens membres de l'AZI. Le premier aspect de la critique affirme implicitement que la qualité des enseignants zen s'incarne dans leurs comportements quotidiens. Leurs imperfections morales ne peuvent être interprétées que comme signant leur disqualification. Un autre aspect de la conception de l'autorité chez les convertis, se trouve dans ce que Ralf Halfmann dénonce comme le culte de la personnalité du fondateur au sein de l'organisation. C'est en terme de "contrôle mental" qu'il analyse la référence continuelle à T. Deshimaru rôshi ainsi que les enseignements donnés pendant le zazen.

Ces critiques représentent, d'une certaine manière, les deux facettes de l'autorité d'un maître zen en Occident. D'une part, il (ou elle) est considéré comme ayant expérimenté (par une pratique sous la direction d'un maître qualifié) un éveil perceptible dans chacune de ses actions. D'autre part, on s'attend à le (la) voir exercer son autorité pour ce qu'il (elle) est, plus que pour son accréditation ou ses affiliations. Deux conséquences importantes doivent être mentionnées.

Tout d'abord, il s'ensuit que l'autorité des maîtres zen déborde le cadre spirituel ou religieux, pour englober chaque aspect de l'existence. Autorités charismatiques exemplaires, admirés dans tous les aspects de leur comportement quotidien, ils peuvent de même être critiqués, voire délégitimés par les disciples pour leur comportement privé. Si les disciples attendent parfois d'eux une aide sur à peu près tous les problèmes qu-ils peuvent rencontrer, qu'ils soient psychologiques, professionnels ou personnels, lorsque le lien est rompu, les mêmes leur reprocheront toutes sortes d-abus. Ensuite, l'accent mis sur l'expérience supranaturelle du maître tend à faire découler toute autorité du charisme, toute décision finale devenant du ressort du dirigeant. Ainsi, le guide spirituel est aussi administrateur en chef. Parce que ses décisions portent un poids énorme et qu-il n-existe pas de contre-pouvoir dans le groupe réuni autour du maître, des abus de pouvoir sont possibles.

Cet "examen critique de l'AZI", tout comme les scandales dans les centres américains ou européens, montre que cette idéalisation du maître zen, avec toute l'autorité que cela implique, ne va pas sans conflits [56]. Plusieurs universitaires, des bouddhistes, et des chercheurs bouddhistes se sont attaqués à cette question, tout au moins en ce qui concerne le "Zen américain". Stuart Lachs affirmait récemment que l'idéalisation de l'autorité du maître zen l'aliénait tout autant que les pratiquants. Helen Tworkov, et plus récemment Victor Hori, soutiennent que ces malentendus reposent souvent sur des différences culturelles [57].

Victor Hori rapporte que lors de son apprentissage au Japon, les enseignements au jour le jour reposaient sur une hiérarchie fondée sur l'ancienneté. Ils étaient donnés à tour de rôle par tous les moines du monastère. En raison de ces changements de position et de responsabilité, chacun recevait, à un moment ou à un autre, des instructions (souvent succinctes) d'un pratiquant plus expérimenté. V. Hori souligne que, dans le centre américain qu'il a visité, la fonction explicite de l'autorité (l'enseignement) relève du maître seul. Je voudrais maintenant m'attarder sur la relation maître-disciple, bien que les observations d'Hori montrent qu'il ne s'agit qu'un des aspects de la problématique de l'autorité. Seule une étude ethnographique complète pourrait examiner tous les niveaux d'autorité dans les groupes étudiés.

En quoi ces remarques s'appliquent-elles à notre étude de cas ? Taisen Deshimaru n'était pas un partisan de la vie monastique. Portant un regard critique sur l'état des organisations zen au Japon, il fonda des centres de retraite pour laïcs plutôt que des institutions monastiques [58]. Malgré tout, une part de son autorité provenait de son statut de membre ordonné d'une institution centenaire [59]. Avec l'apparition d'une seconde (et parfois d'une troisième) génération d'enseignants, les positions divergent. Une minorité d'anciens élèves de Deshimaru mettent l'accent sur la pratique dans un contexte monastique. Ils arguent que le bouddhisme a toujours historiquement été transmis dans un cadre monastique, ce qui conduit un converti au commentaire suivant "le Zen n'est pas encore arrivé en Occident", puisqu'un réseau formel de monastères n'a pas encore été constitué [60].

Christopher Queen a décrit "le nivellement des hiérarchies spirituelles, traditionnelles et institutionnelles" (la féminisation et la laïcisation) comme une tendance à la "démocratisation" du bouddhisme américain [61]. Une minorité de pratiquants zen européens représentent une autre tendance. Pour eux, la transmission de maître à disciple est le fondement d'une "hiérarchie spirituelle" qui n'est pas démocratique [62].

Selon un maître zen Français, qui pratiqua d'abord avec Taisen Deshimaru, "Nul ne peut se certifier lui-même, de même que le groupe ne peut certifier son maître. C'est de la politique. La vie spirituelle n'a jamais été destinée à être populaire. Vous avez besoin d'un véritable maître parce qu'aucun pratiquant sincère ne peut être certain de pas perdre son temps dans de fausses voies". [63]. La reconnaissance officielle s'identifie ici avec la réalisation spirituelle. Le charisme individuel doit être certifié dans les formes (et les institutions) prescrites. Ce n'est pas le groupe qui limite l'autorité du dirigeant, mais les règles (les préceptes) qui définissent son statut.

Cependant, la majorité des anciens disciples de T. Deshimaru soutiennent que le Zen ne nécessite pas un entraînement monastique. Attentifs à ne pas retomber dans ce qu'ils considèrent comme les pièges des grandes organisations japonaises - la prééminence des aspects formels sur l'expérience spirituelle authentique (appelés "formalisme" dans les groupes étudiés) - ils insistent sur l'aspect personnel de la transmission. Un enseignant écrit : "La transmission implique deux individus et ne requiert ni institution, ni statut social particulier" [64]. Conformément à cette conception, la pratique laïque est perçue comme tout aussi difficile que la pratique monastique. Et la réalisation spirituelle est plus importante que le statut de moine ordonné.

Ces différentes conceptions ont des conséquences lourdes sur les relations maître-disciple observées dans ces groupes, qui oscillent entre deux modèles distincts. Ces modèles ne sont pas figés et peuvent varier à l'intérieur d'un groupe donné selon les tendances ou l'ancienneté des personnes. Lorsque l'accent est mis sur la réalisation spirituelle, la relation peut être décrite, suivant la typologie proposée récemment par Coleman, comme celle "d'amis spirituels" (pâli Kalyana-mitta) [65]. Ce lien affectif entre compagnons-chercheurs est fait d'échanges mutuels, plus qu'il ne relève d'une simple transmission de savoir d'un individu à un autre. Comme le remarque Coleman, ces relations rappellent celles qui unissent un frère plus âgé à son cadet.

La plupart des groupes de l'AZI se rapprochent de ce modèle : on s'adresse aux enseignants par leur prénom. En dehors du dôjô, des cérémonies collectives et des repas ritualisés (jap. oryôki), on observe peu de signes de déférence, et les pratiquants se sentent libres de s'adresser aux enseignants. L'un des enseignants de l'AZI expliquait que "cette proximité est indispensable à l'enseignement. Si les étudiants s'en tiennent à eux-mêmes et ne peuvent pas librement établir une relation informelle avec leur enseignant, l'enseignement au quotidien devient impossible. J'essaye toujours de ne pas devenir inaccessible aux disciples." Nos observations montrent que, à l'exception des décisions directement liées à la pratique établie par le fondateur, les décisions sont discutées et commentées par les participants, qui sont écoutés, quelle que soit leur expérience de la pratique.

Dans les groupes qui mettent l'accent sur la hiérarchie spirituelle, les étudiants ont tendance à s'adresser à leurs enseignants comme à une "autorité spirituelle". Dans cette relation, les signes de déférence ne sont pas limités aux rituels, et seul un petit nombre d'étudiants peuvent s'adresser de façon informelle à l'enseignant. Il y a une plus grande distance sociale entre l'enseignant et les étudiants. Des règles codifient la manière de s'adresser à l'enseignant (on utilise le titre japonais de sensei plutôt que le prénom) ou de se comporter en sa présence.

J. Coleman a comparé ce mode relationnel au modèle confucéen patriarcal, notant que "comme en Asie, on attend des subordonnés qu'ils respectent et obéissent à leurs supérieurs, et des supérieurs qu'ils éprouvent un souci paternel pour le bien-être de leurs subordonnés." [66]. Dans ce cas, l'enseignant ne se limite pas à donner des conseils spirituels, il (elle) a une autorité presque totale sur l'administration des centres et la vie quotidienne de ses étudiants. La plupart des élèves de Taisen Deshimaru le considéraient de cette façon, ils se définissaient d'ailleurs comme ses "disciples" plutôt que ses "élèves".

Les typologies présentées ici sont des outils heuristiques. Jack Kornfield souligne que : "Selon les moments, notre enseignant peut remplir différents rôles : mentor et prêtre, confesseur et guide, accoucheur spirituel et critique, miroir et exemple d'une présence lumineuse." [67]. Du reste, la plupart des groupes étudiés utilisent les deux types d'autorité ou changent de type d'autorité au fil du temps. Du vivant de T. Deshimaru, le second type caractérisait son organisation qui était fortement centralisée et qu'il dirigeait clairement jusque dans ses moindres détails. Après son décès en 1982, comme seuls trois de ses disciples avaient reçu le certificat de transmission (shihô) et avaient été cooptés par le groupe (et non par le maître), la structure de l'autorité a évolué vers le modèle de "l'amitié spirituelle". La littérature interne décrit souvent les relations entre ses anciens disciples comme celles de "frères et soeurs dans le dharma".

Vers la fin des années 1990, avec l'émergence de nouveaux enseignants, un nombre croissant d'anciens disciples recevaient la certification de maître zen (à l'intérieur ou à l'extérieur de l'AZI), la relation maître-disciple réapparut progressivement, revenant lentement au modèle de "l'autorité spirituelle". D'autres variables ont également influé sur cette évolution, comme l'âge des enseignants (la plupart d'entre eux avaient seulement une quarantaine d'années quand leur maître mourut), ou la croissance des groupes (les petits groupes tendent à adopter le premier modèle, tandis que les organisations plus importantes impliquent inévitablement une interaction distanciée avec leur dirigeant).

En conséquence, l'AZI semble maintenant évoluer vers une nouvelle étape, avec un nombre limité d'enseignants reconnus, conduisant des groupes autonomes mais apparentés, créant ainsi un réseau comparable aux autres organisations zen occidentales, comme le Diamond Sangha ou le White Plum Sangha [68]. Ce développement est à mettre en relation avec un nouveau contexte.

Le nombre important d'enseignants zen en Europe, étudiés dans la première partie, oblige à définir un modèle clair d'autorité. Certains enseignants en activité ont été autorisés à enseigner dans une lignée particulière, d'autres sont autoproclamés ou choisis par un groupe donné. Avec comme résultat que, pour pouvoir être reconnues par les autres organisations et se distinguer des groupes jugés moins authentiques, les communautés zen doivent établir leur légitimité et afficher un modèle clair d'autorité. Les trois problématiques de la viabilité, de la légitimité et de l'autorité doivent être combinées. D'autres études de cas permettront d'affiner les classifications proposées et d'identifier des modèles différents de transmission des pratiques du Zen en Europe [69].


Conclusion : Pour une médiologie du Zen en Europe

Le Zen est souvent défini par le vers attribué à Bodhidharma, "une transmission en dehors des écritures", mais il existe peu de littérature sur les organisations définissant et entretenant cette transmission en Europe actuellement.

Ce manque d'attention accordé aux différenciations institutionnelles doit peu à une propagande bouddhiste, comme certains observateurs l'ont récemment soutenu. Nombre de nos correspondants bouddhistes concluent trop facilement que cette diversification des interprétations et des pratiques zen provient simplement de la plus ou moins grande maturité de pratique des Européens et de la clarification de leurs définitions et de leurs attentes. En insistant sur l'expérience zen comme seul critère valide pour décrire la pratique du Zen, ils dévalorisent l'étude des institutions, naturelle aux sociologues, la comparant à la tentative de saisir le reflet de la lune dans l'eau.

Pourtant les sociologues ont explicitement démontré que l'expérience religieuse n'est pas simplement une question personnelle, une expérience subjective, mais aussi une oeuvre collective. Comme l'explique P. Berger : "L'expérience est crédible parce que chacun en parle en tant que telle et que chacun agit comme si elle l'était - et que des désagréments divers attendent ceux qui diraient le contraire." [70]

La plupart des pratiquants zen nieraient totalement que des désagréments attendent ceux qui ne croient pas à la réalité de cette expérience. Pourtant, la participation à la vie et à la pratique quotidienne des groupes montre clairement qu'il y a toujours une orthopraxie, c'est-à-dire une façon correcte de faire les choses et un certain nombre d'objets de foi, qui définissent chaque groupe.

Quel peut être l'apport de la sociologie pour notre compréhension d'un Zen européen en construction ? Tout d'abord elle nous permet de prendre comme point d'appui le phénomène de la transmission dans les cercles zen, sans le réduire à la matérialité d'un objet transmis d'une personne à une autre, ni le prendre à sa valeur nominale. Les pratiquants et la littérature zen montrent clairement qu'il ne s'agit pas d'un objet à transmettre, ou selon la formule bien connue, qu'il s'agit seulement "d'une transmission d'esprit à esprit" (jap. ishin denshin).

Même un examen rapide des travaux universitaires sur l'histoire du Zen révèle combien le discours sur la lignée de transmission est une rhétorique inventée au plus tôt au début de la dynastie Tang par des groupes chan en quête de légitimité [71]. Et que la transmission relevait dès le départ de jeux sociopolitiques de pouvoir. Porter l'attention sur les organisations qui perpétuent (ou redéfinissent) la transmission dans un nouveau contexte n'est pas simplement conforme aux méthodes de la sociologie classique, cela évite également d'adopter une approche naïve de la construction du Zen occidental.

Comme il a été dit plus haut, les groupes ont un coût élevé à payer lorsqu'ils choisissent de maintenir l'illusion d'une communauté idéale d'êtres éveillés vivant sans conflits ni défauts. Les choix organisationnels qui s'entendent dans les discours des groupes sont, aujourd'hui comme il y a 1.300 ans, des éléments de stratégie qui font partie intégrante du tableau. Identifier de telles stratégies ne signifie pas qu'un esprit calculateur ou manipulateur soit à l'origine de ces choix collectifs. Il s'agit d'attirer l'attention des universitaires et des pratiquants sur les conséquences possibles de ces orientations.

Le second apport de l'approche médiologique apparaît dès qu'on tente de donner un sens à la diversification des styles de la pratique du Zen. On se rappellera utilement que, dans une perspective médiologique, la transmission implique une différentiation. Selon R. Debray, "Toute entreprise de transmission [est] une opération polémique, requérant une compétence stratégique (à s'allier, filtrer, exclure, hiérarchiser, coopter, démarquer, etc.), et qui peut s'appréhender comme une lutte pour la survie au sein d'un système de forces rivales tendant soit s'éliminer entre elles par disqualification soit à s'annexer l'une l'autre par phagocytose." [72]

Ce qui expliquerait la présence simultanée de tendances contraires au sein des institutions zen européennes : d'un côté des orientations non limitées ou transversales aux écoles, de l'autre de fortes positions et oppositions d'écoles. Cette analyse permet surtout de montrer que les deux tendances sont des composantes nécessaires de la transmission.

Cartographier le terrain, souligner les dynamiques géographiques - résister au temps requiert une stratégie territoriale - n'offre pas simplement une meilleure compréhension des institutions zen européennes. Cela sert également à comprendre la formation actuelle des formes occidentales du bouddhisme.


Remerciements

De nombreux bouddhistes m'ont généreusement consacré du temps et fourni des informations pour écrire cet article. Ces bodhisattvas resteront anonymes, mais je sais qu'ils se reconnaîtront, et j'espère qu'ils accepteront ma gratitude. Je remercie tout particulièrement les personnes suivantes, qui en ont lu les premières versions : Martin Baumann, Charles S. Prebish, Michelle Spuler, Luc Boussard, Philippe Coupey, Éric Rommeluère et Wolfgang Wass qui ont tous trouvé du temps dans leur emploi du temps surchargé pour me faire part de leurs suggestions éclairantes. Je reste seul responsable des erreurs ou des mauvaises interprétations.


Notes

[1] Je ne veux pas dire par là qu'aucune recherche n'ait été menée en Europe sur les groupes de convertis. Je veux simplement souligner que dans certains milieux américains, l'expression "Zen occidental" est utilisée comme synonyme de "Zen américain", laissant de côté des développements qui font partie intégrante d'un paysage plus large. Une approche plus globale du phénomène a été adoptée dans l'ouvrage collectif édité sous la direction de Martin Baumann et de Charles S. Prebish, Westward Dharma: Buddhism beyond Asia, Berkeley, University of California Press, 2002. [Retour]

[2] Henrik Karlsson, Towards a European Zen?, Uppsala, Zenvägen, 1993. [Retour]

[3] Henrik Karlsson, Towards a European Zen?, Uppsala, Zenvägen, 1993, p. 2. Souligné dans la version originale. [Retour]

[4] Tim Pallis, "Zen pâ Dybbolsbro," Buddhistisk Forum, 1 (1994), p. 17. (Ma traduction). [Retour]

[5] Le terme de Zen, ainsi que les références à la pratique et à la philosophie du bouddhisme Zen, est une sorte de "mot-valise" des années 1970 dans les milieux de la contre-culture. Au cours des deux décennies suivantes, le terme fut de plus en plus utilisé dans la culture dominante pour désigner une esthétique inspirée du Japon et/ou d'un état mental apaisé. [Retour]

[6] Heinrich Dumoulin, Zen Buddhism in the 20th Century, New-York, Weatherhill, 1992, p. 9. [Retour]

[7] Régis Debray, Transmettre, Paris, Odile Jacob, 1997, p. 49. [Retour]

[8] Philip A. Mellor a fait un constat similaire. Voir P. Mellor, "Protestant Buddhism: The Cultural Translation of Buddhism in England" in Religion, 21, 2 (1991), pp. 73-92. [Retour]

[9] Régis Debray, Transmettre, p. 28. [Retour]

[10] Autriche, Belgique, Danemark, France, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Norvège, Pologne, Portugal, Espagne, Suisse, Suède et Royaume-Uni. [Retour]

[11] Thomas Tweed, "Night-stand Buddhists and Other Creatures" in American Buddhism: Methods and Findings in Recent Scholarship, sous la direction de Duncan R. Williams et de Christopher S. Queen, Richmond, Curzon 1999, pp. 71-90. [Retour]

[12] Des études récentes indiquent que les communautés immigrées sont très différentes des communautés converties. Voir notamment Charles Prebish, "Two Buddhisms Reconsidered", Buddhist Studies Review, 10 (1993), pp. 187-206 ; Jan Nattier, "Who is a Buddhist?" in The Faces of Buddhism in America, sous la direction de Charles S. Prebish et de Kenneth K. Tanaka, Berkeley, University of California Press, 1998, pp. 183-195 ; Paul Numrich, Old Wisdom in the New World, Knoxville, University of Tennessee Press, 1996. [Retour]

[13] Sources : Éric Rommeluère, Guide du Zen, Paris, Librairie Générale Française 1997 ; Philippe Ronce, Guide des centres bouddhistes en France, Paris, Noésis, 1998; Alain Sillard, Bouddhisme, Guide des écoles du Bouddhisme en France, Suisse et Belgique, Paris, Lesir, 1998 ; et le supplément de l'Austrian Buddhist Association, Ursache und Wirkung (automne 1998).

Parmi les nombreux annuaires disponibles sur la toile, trois ont été retenus. L'un a été compilé par l'IRIZ (International Research Institute for Zen Buddhism from Hanazano University in Kyoto). Il est disponible à l'adresse http://iriz.hanazono.ac.jp/zen_centers/country_list_e.html. Un second est fourni par le GREZ (Groupe de Recherche et d'Étude sur le Zen, Université Bouddhique Européenne à Paris) : http://www.bouddhisme-universite.org/grez.html. La dernière (et non la moindre) source d'information sur les centres zen en Europe est fournie par le site informatif animé par M. Ciolek pour le RSPAS (Research School of Asian and Pacific Studies, Australian National University in Canberra) disponible à l'adresse : http://www.ciolek.com/. [Retour]

[14] Pour l'intégralité de cette étude, voir Alioune Koné, "L'Ouverture de la Montagne", mémoire de doctorat (Ecole des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, à paraître). [Retour]

[15] Jeff Shore, "Japanese Zen and the West: Beginnings", FAS Society Journal, summer 1992, pp. 46-82, repris de Anthology of FoKuang Shan International Buddhist Conference (1990), pp. 438-460. [Retour]

[16] Martin Baumann, "Creating a European Path to Nirvana. Historical and Contemporary Developments of Buddhism in Europe", Journal of Contemporary Religion, 10, no. 1, 1995, pp. 55-70. [Retour]

[17] Sur ces développements historiques, voir le chapitre de Martin Baumann dans le numéro cité ci-dessus. [Retour]

[18] Voir Christmas Humphreys, Sixty Years of Buddhism in England, London, Pelican Books, 1968. [Retour]

[19] Christmas Humphreys, Buddhism, London, Pelican Books, 1951, réédition 1995, p. 179. [Retour]

[20] Abe Maseo, A Zen Life: D.T Suzuki Remembered, New-York, Weatherhill, 1986, p. 21. Voir ausi Henrich Dumoulin, Zen in the 20th Century, pp. 4-10 et Bernard Faure, Chan Insight and Oversights: An Epistemological Critique of Chan, Princeton, Princeton University Press, 1993, pp. 52-88. [Retour]

[21] August Faust Ohasama, Zen, der lebendige Buddhismus in Japan, Gotha, 1925, cité par Dumoulin, Zen in the 20th Century, traduit sous le titre "Professor Rudolf Otto on Zen Buddhism", The Eastern Buddhist, 3, no. 2, Juillet-Août-Septembre 1924, pp. 117-125. Voir aussi Martin Baumann, Deutsche Buddhisten. Geschichte und Gemeinschaften, Marburg, Diagonal, 1995, p. 65. [Retour]

[22] Eugen Herrigel, Zen in der Kunst des Bogenschiessens, Munich, O.W. Barth Press, 1997, première édition 1948 (Traduction anglaise New-York, Pantheon Press, 1952). Pour une critique récente et décapante de l'interprétation d'Herrigel, voir Shôji Yamada, "The Myth of Zen in the Art of Archery" in Japanese Journal of Religious Studies, 2001, 28/1-2. [Retour]

[23] Voir Brian Victoria, Zen at War, New-York, Weatherhill, 1997. L'édition française, Le Zen en guerre 1868-1945, Paris, Le Seuil, 2001, est une version augmentée. Voir aussi Robert H. Sharf, "Whose Zen? Zen Nationalism Revisited" in Rude Awakenings, James W. Heisig and John C. Maraldo, Honolulu, University of Hawai'i Press, 1995, pp. 40-51 et Robert H. Sharf, "The Zen of Japanese Nationalism," History of Religions, 33/1 (1993), pp. 1-43. [Retour]

[24] Thomas A. Tweed a présenté cette typologie dans The American Encounter with Buddhism, 1844-1912: Victorian Culture and the Limits of Dissent, Bloomington, Indiana University Press, 1992, pp. 48-77. Sur la réthorique de l'expérience voir Robert H. Sharf, "Buddhist Modernism and the Rhetoric of Meditative Experience", Numen, vol. 42, 1995, pp. 228-83. [Retour]

[25] Cité dans Theodore Roszak, The Making of a Counter Culture, Garden City, New-York, Anchor Books, 1969, p. 132. [Retour]

[26] L'influence de Watts est analysée dans Monica Furlong, Zen Effects: The Life of Alan Watts, Boston, Houghton Mifflin 1986, pp. 155-185. [Retour]

[27] Ernst Benz, Zen Buddhismus und Zen Snobismus, Weilheim, Obb, 1962. [Retour]

[28] Voir Baumann, Deutsche Buddhisten, pp. 68-81. [Retour]

[29] Voir Lenoir, Le Bouddhisme en France, Paris, Fayard, 1999, pp. 278-284, ainsi que Stephen Batchelor, The Awakening of the West: The Encounter of Buddhism and Western Culture, London Harper Collins, 1994, pp. 120-123 et 136-137. [Retour]

[30] Pour une évocation de Seung Sahn par certains de ses premiers étudiants, voir Only Doing it for Sixty Years, sous la direction de Diana Clark, Cumberland, Primary Point Press, 1987. [Retour]

[31] Soeng Mu, "Korean Buddhism in America." in The Faces of Buddhism in America, sous la direction de Charles Prebish et de Kenneth Tanaka, p. 122. [Retour]

[32] Sur la première période de son action missionnaire au Brésil, voir Christina Moreira da Rocha, "Zen in Brazil: Brazilian or Japanese," Journal of Global Buddhism, 1 (2000), pp. 31-55. Disponible en ligne à l'adresse http://jgb.la.psu.edu/1/darocha001.pdf. [Retour]

[33] Voir Stephen Batchelor, The Awakening of the West, pp. 119-137. Voir aussi Peggy Jiyu Kenneth, How to Grow a Lotus Blossom, Mount Shasta, Shasta Abbey Press, 1977. [Retour]

[34] Sur l'organisation de T. Lathouwers, voir Rommeluère, Guide du Zen, p. 121. Une présentation de l'Association du Chan Occidental se trouve sur son riche site Internet : http://www.w-c-f.org.uk/. [Retour]

[35] Voir le site : http://www.kwanumzen.com/. [Retour]

[36] Voir Rommeluère, Guide du Zen, p. 87. [Retour]

[37] Sur Enomiya-Lasalle, voir Ursula Baatz, Enomiya-Lasalle, Ein Leben Zwischen den Welten, Dusseldorf, Benziger, 1998. [Retour]

[38] Voir Manfred Bergler, "Ein Abriss der Rezeptionsgeschichte des Zen-Buddhismus in Deutschland [besonders des Beitrages von Graf K. von Durckheim]," Zeitschrift für Religions- und Geistesgeschichte, 36, 1 (1984) : pp. 39-52 ; voir aussi Gerhard Wehr, Dürkheim, Une vie sous le signe de la transformation, Paris, Albin-Michel, 1997. [Retour]

[39] (Sous la direction de) Henrik Karlsson, Towards a European Zen ?, Uppsala, Zenvägen, 1993, p. 42. [Retour]

[40] Voir Robert Sharf, "Zen and the Way of the New Religions", Japanese Journal of Religious Studies, 22/3-4 (1995), pp. 417-58. [Retour]

[41] Une approche similaire est développée par Kenneth Kraft dans son article, "Recent Developments in North American Zen" in Kenneth Kraft (sous la direction de), Zen: Tradition and Transition, New-York, Grove Press, 1988, pp. 178-198. [Retour]

[42] Duncan Williams et Senryoo Asai, "Japanese American Zen Temples: Cultural Identity and Economics" in American Buddhism: Methods and Findings in Recent Scholarship, sous la direction de D. Williams and C. Queen, Richmond, Curzon Press, 1999, pp. 20-35. [Retour]

[43] Douglas M. Padgett, "Americans Need Something to Sit On", Journal of Global Buddhism, 1 (2000), pp. 61-81. Padgett donne une approche du bouddhisme des convertis qui laisse entendre que la vente (ou la revente) d'objets liés à la méditation, représente dans beaucoup de centres de convertis, un moyen alternatif pour générer un revenu supplémentaire, surtout lorsque les activités de méditation sont proposées à titre gratuit. [Retour]

[44] On pourrait affirmer que l'augmentation des membres génère plus de profits. Cependant, l'analyse économique classique des entreprises a depuis longtemps montré que la croissance entraîne des économies d'échelle, jusqu'au moment où elle implique de nouveaux investissements qui surchargent considérablement les dépenses. [Retour]

[45] Cette définition de l'attitude religieuse se trouve dans Danièle Hervieu-Léger, La Religion pour Mémoire, Paris, Éditions du CERF, 1997, p. 141. [Retour]

[46] D'après des enseignements donnés pendant la méditation, Dojo Zen de Paris (affilié à l'AZI), février 1998. [Retour]

[47] Entretien informel avec un pratiquant de trente-cinq ans, Italie, novembre 1997. [Retour]

[48] Enseignements donnés pendant la méditation (zazen), Dojo Zen de Paris, février 1998. [Retour]

[49] Frédéric Lenoir, Le Bouddhisme en France, Paris, Fayard, 1999, p. 286. [Retour]

[50] Sur les relations entre bouddhisme et Nouvel Age, voir Denise Cush, "British Buddhism and the New Age", Journal of Contemporary Religion, 11, 2 (1996), pp. 195-208. [Retour]

[51] Anthony Giddens, The Consequences of Modernity, Oxford, Polity, 1990, p. 38. Traduction française, Les conséquences de la modernité, Paris, L'Harmattan, 1994, p. 44. [Retour]

[52] Danièle Hervieu-Léger, Le Pèlerin et le converti, Paris, Flammarion, 1999, pp. 180-183. [Retour]

[53] Pour une brillante analyse historique des ces développements, voir Richard Seager, Buddhism in America, New-York, Columbia University Press, 1999, pp. 185-200. [Retour]

[54] John Crook a fait une fine analyse de ces scandales et de leurs conséquences dans son article, "The Place of Ch'an in PostModern Europe," New Ch'an Forum, 22, Autumn (2000), p. 18. http://www.w-c-f.org.uk/. [Retour]

[55] Ralf Halfmann, "Zen in the West. A Critical Review of the International Zen Association," 1998, http://www.darkzen.com/. [Retour]

[56] Pour une analyse des effets désastreux de cette idéalisation dans les organisations zen américaines, voir "A Slice of Zen in America", New Ch'an Forum, 10 (1994), pp. 12-20. [Retour]

[57] Helen Tworkov, Zen in America, New-York, Kodansha, 1994, première édition 1989, Introduction, pp. 4-20. Victor Soogen Hori, "Japanese Zen in America: Americanizing the Face in the Mirror." In Charles S. Prebish and Kenneth K Tanaka, eds., The Faces of Buddhism in America, Berkeley, University of California Press, 1998, 3-78. Stuart Lachs, "Means of Authorization: Establishing Hierarchy in Ch'an/Zen in America," article présenté à la conférence de l'AAR en 1999. Disponible en ligne à l'adresse http://www.mandala.hr/5/aar.html. [Retour]

[58] Selon certains de ses anciens élèves, il serait revenu à la vision d'un temple plus traditionnel à la fin de sa vie sans pouvoir l'accomplir, non seulement à cause de ses problèmes de santé, mais aussi en raison de la très grande résistance de ses plus anciens élèves. [Retour]

[59] D'après son autobiographie, il reçut l'ordination de moine de son maître, Kôdô Sawaki (1880-1965) après avoir pratiqué comme laïc, avec comme mission d'apporter le Zen en Occident. Taisen Deshimaru, Autobiographie d'un moine zen, Lyon, Terre du ciel, 1995, première édition 1977, p. 175. [Retour]

[60] Entretien personnel avec un pratiquant de trente-neuf ans, février 1996, Hambourg. [Retour]

[61] Christopher Queen, "Introduction" in American Buddhism: Methods and Findings in Recent Scholarship, sous la direction de Duncan R. Williams et de Christopher S. Queen, Richmond, Curzon Press, 1999, p. xix. [Retour]

[62] Rita Gross utilise le terme de "hiérarchie naturelle", qui est proche, mais non identique, car ses fortes restrictions au pouvoir du gourou ne se trouve pas dans le discours de nos interviewés, en partie parce que le modèle du gourou est moins prédominant dans les cercles zen que dans le bouddhisme tibétain où elle a pratiqué. Voir Rita Gross, "Helping the Iron Bird Fly: Western Buddhist Women and Issues of Authority in the late 1990s" in Charles Prebish and Kenneth Tanaka, eds., The Faces of Buddhism in America, Berkeley, University of California Press, 1998, pp. 238-252. [Retour]

[63] Entretien avec un enseignant zen, Blois, novembre 1998. [Retour]

[64] Courrier électronique privé, août 2000. [Retour]

[65] James William Coleman, The New Buddhism, Oxford University Press, New-York, 2001, pp. 128-137, où il décrit une typologie tripartite. La troisième sorte de relation où l'enseignant, perçu comme un "gourou", fait l'objet d'une relation dévotionnelle de la part des disciples, n'a pas été observée dans les groupes relevant de T. Deshimaru rôshi. Coleman remarque que le cas est plus fréquent dans le bouddhisme tibétain. [Retour]

[66] James William Coleman, The New Buddhism, New-York, Oxford University Press, 2001, p. 129. [Retour]

[67] Jack Kornfield, A Path with Heart, New-York, Bantam, 1993, p. 136. Cité dans J. Coleman, The New Buddhism, New-York, Oxford University Press, 2001, p. 128. [Retour]

[68] Le Diamond Sangha est le réseau des anciens élèves de Robert Aitken. Le White Plum Sangha est le réseau des héritiers du dharma de Taizan Maezumi rôshi (1931-1995). [Retour]

[69] A paraître : d'importants travaux sur l'Ordre des Bouddhistes Contemplatifs par David Kay (Lancaster University) et sur l'Ordre de l'Inter-Etre par Sebastien Jarnot (Université de Rennes 2). [Retour]

[70] Peter Berger, The Heretical Imperative, Garden City, AnchorPress/Doubleday, 1979, p. 48. [Retour]

[71] Voir entre autres, Bernard Faure, The Will to Orthodoxy: A Critical Genalogy of Ch'an Buddhism, Stanford University Press, 1997 ; Griffith Foulk, "the Ch'an Tsung in Medieval Japan: School, Lineage or What?" in "The Pacific World", Journal of the Institute of Buddhist studies, new series, 8 (Fall 1992), pp. 18-31 ; et William Bodiford, "Dharma Transmission in Sôtô Zen," in Monumenta Nipponica, 46, 4, pp. 423-451. [Retour]

[72] Debray, Transmettre, p. 21. [Retour]

© Alioune Koné, 2000, révisé 2004. Reproduction interdite. [Télécharger et imprimer le texte complet au format pdf]


A lire sur le site : Un Zen à l'Occidentale est-il possible ?, une réflexion sur l'occidentalisation du Zen en Europe qui fait le pendant à cet article.


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