Organisation internationale non-violente, Peace Brigades International (PBI) intervient dans des régions d'extrême violence ou de répression politique du globe. Elle y assure notamment l'escorte et la protection de groupes ou de personnes "à risque", le plus souvent des défenseurs des droits de l'Homme et de la démocratie. L'un de ces militants, Mario Calixto, doit sans doute la vie à ces gardes du corps d'un genre bien particulier dont la seule arme est un appareil photo.
Au cours des dernières années, ce Colombien, président du Comité des Droits de l'Homme de la ville de Sabana de Torrès, était régulièrement menacé. À plusieurs reprises, les Brigades de la Paix, installées en Colombie depuis 1994, l'avaient, à sa demande, accompagné dans ses déplacements. Mais l'accentuation des menaces les conduisit à mettre en place une escorte permanente de deux volontaires qui se relayait presque 24 heures sur 24 à ses côtés. Les Brigades avaient par ailleurs alerté les forces en présence (la guérilla et les forces gouvernementales) de la mise en place du dispositif. L'organisation médiatise en effet ses actions auprès des différentes parties et de la communauté internationale pour dissuader d'éventuelles actions meurtrières. Pourtant, un jour de décembre 1997, alors que Mario Calixto se trouvait chez lui, deux hommes armés firent irruption dans sa maison et demandèrent à avoir "une conversation" avec lui. Ses deux gardes du corps non-violents se firent immédiatement connaître et Mario Calixto profita de la confusion pour s'enfuir. Les volontaires réussirent à tenir tête aux mercenaires qui les menaçaient de leurs armes. Finalement ceux-ci renoncèrent à leur action et partirent. Immédiatement, l'antenne colombienne des Brigades de la Paix déclencha la procédure d'alerte d'urgence comme à chaque fois que des personnes protégées sont en danger en mort. En moins de quelques heures et grâce à la mobilisation d'un réseau qui s'appuie sur des milliers de relais dans le monde (des parlementaires, des religieux et, bien entendu, les membres de BPI), les autorités colombiennes recevaient des appels, des faxs et des télexs de nombreuses organisations du monde entier et d'ambassades ainsi que du Bureau des Droits de l'Homme du Haut Commissariat des Nations Unies en Colombie. Des mesures immédiates de protection furent alors prises par les autorités.
La Colombie est en proie à une guerre civile qui ne dit pas son nom. À la demande de plusieurs ONG et des églises colombiennes, PBI a mis en place trois équipes dans ce pays. Elles y mènent, chacune dans des régions différentes, des activités de réseaux avec des responsables du gouvernement et des forces de sécurité, le corps diplomatique et des ONG locales ou internationales. L'une d'entre elles travaille avec les populations de la région d'Uraba, l'un des anciens fiefs de la guérilla communiste, dans le nord-ouest du pays. Elle assiste les communautés locales, souvent déplacées, dans le refus de la violence et de toute collaboration avec les guérilleros des Forces Armées Révolutionnaires (FARC) de Colombie ou leurs adversaires, les milices paramilitaires. Par le nombre de ses permanents, une vingtaine en tout, les Brigades de la Paix est aujourd'hui la première ONG présente en Colombie.
L'organisation est active dans d'autres régions du monde : en Amérique du Nord (où elle travaille avec les populations amérindiennes), en Haïti, au Timor Oriental, au Mexique et dans les Balkans. Ses premiers volontaires ont été envoyés en 1983 au Guatemala afin d'assister et d'escorter les membres du Groupe de Soutien Mutuel (Grupo de Apoyo Mutuo), une association de familles de disparus dont plusieurs dirigeants avaient été assassinés. En 1987, elle entreprit des actions similaires au Salvador ; actions qui se poursuivirent jusqu'en 1992, année où fut signé un traité de paix entre la guérilla et le gouvernement salvadorien. Depuis 1994, PBI est également présente dans les pays de l'ex-Yougoslavie où elle a formé avec 10 autres organisations, le réseau des Équipes de Paix dans les Balkans (Balkan Peace Team, BPT). La première équipe est arrivée en 1994 en Croatie où elle a placé des volontaires à Karlovac (près de Zagreb) et à Split (sur la côte dalmate). Leur travail comprend notamment la sensibilisation des populations, l'accompagnement au retour des populations déplacées, la visite de camps de réfugiés et une présence lors des manifestations organisées par des associations de défense des droits de l'homme. L'évolution récente de la situation politique dans la région a conduit le BPT à recentrer ses activités au Kosovo et sur la médiation entre les populations serbes et albanaises.
Assister, protéger, accompagner sont les maîtres mots de l'action de PBI. Dans ses différents projets, celle-ci met l'accent sur l'accompagnement protecteur des organisations et des personnes menacées (chez eux, dans leur travail, à l'hôpital et parfois 24 heures sur 24 comme dans le cas de Mario Calixto). La présence de volontaires non-armés se veut à seule dissuasive dans un environnement hostile. Le pari fait est que l'accompagnement par des témoins internationaux déstabilise et modifie la dynamique de la violence. Le danger est cependant bien réel : au Salvador, des volontaires furent une fois attaqués à l'arme blanche et au Guatemala, une grenade explosa dans leur maison (qui heureusement ne fit pas de blessé). Les candidats doivent suivre un entraînement intensif avant d'être sélectionné (travail en équipe, gestion du stress et de la violence, etc.). Ils sont ensuite engagés pour une durée minimum de 6 mois. PBI est financée par un réseau d'organisations diverses (mouvements chrétiens, fondations américaines, syndicats, etc.). Elle fédère près de 12.000 membres et sympathisants réunis au sein de onze groupes nationaux.
Reproduction interdite. La photographie représente Mario Calixto et ses "deux gardes du cœur" (DR). [Télécharger et imprimer l'article au format pdf]
PBI - Section Française : 21 ter rue Voltaire 75011 Paris, Tél. (répondeur) : + 33 (0) 1 43 73 49 60. Courrier électronique : pbi.france@free.fr
Sur le net :
Peace Brigades International
IRNC (Institut de Recherche sur la Résolution Non-violente des Conflits)
MAN (Mouvement pour une Alternative Non-violente)
In memoriam
Jack Kerouac l'avait dépeint sous les traits de Warren Coughlins dans son roman, Les Clodos du Dharma. Philip Whalen, l'un des grands poètes américains s'est éteint à l'âge de 80 ans dans un hôpital de San Francisco. Moins connu en France que Jack Kerouac ou son ami Gary Snyder, il fut pourtant l'un des principaux porte-parole de cette beat generation convertie au bouddhisme. En 1955, il est l'un des cinq lecteurs à déclamer pour la première fois en public Howl, le long poème incantatoire d'Allen Ginsberg, qui marque la renaissance de la poésie américaine d'après-guerre. L'attrait de l'Orient et surtout du Japon, terre mythique des temples zen, aimantent alors Snyder et Whalen. Ce dernier y vivra treize ans. À son retour aux États-Unis, il s'installe au Centre Zen de San Francisco. Tout en continuant d'écrire, il devient une figure du centre bouddhiste où il prend les vœux de moine. En 1987, il est officiellement reconnu maître zen. Il est déjà malade, mais s'exclame alors : "Je suis trop vieux pour créer un monastère bouddhiste, mais nous, les maîtres zen, avons quelque chose à offrir, la méditation et ça je le peux". Par la suite, il prendra néanmoins la direction d'un centre zen établi au cœur du quartier homosexuel de San Francisco dont l'hospice créé pour les malades du sida est resté célèbre, le Hartford Street Zen Center.
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